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    Je viens d’atterrir, le vol a été long, la place trop petite et la nuit peut être trop courte. Au radar je monte dans le premier RER à destination de Paris. Seul dans le wagon aux couleurs criardes des années 80 je me rends compte que c’est un direct pour la Gare du Nord, un de ces RER que les touristes et autres voyageurs bénissent mais que depuis le quai d’une gare de banlieue le commun des mortels maudit (j’ai été celui-là sur le quai de la gare du Blanc-Mesnil).

    Le train s’enfonce dans la banlieue, quittant peu à peu la verdure qui subsiste à Roissy, le grand périurbain, pour retrouver les usines abandonnées de la plus grande couronne. C’est là que mon voyage un peu méditatif (ou plus simplement endormi) est troublé par quelques notes d’accordéon, comme si on testait l’instrument. Je me vois déjà subir sur les kilomètres qui me restent la série supposément française des accordéonistes de métro… mais nulle exclamation joviale ne vient lancer la rengaine.

    Le train traverse un paysage de friche industrielle, de monumentaux graffs, et derrière-moi quelque part dans le wagon vide s’élève une complainte balkanique, une voix lancinante accompagnée par un accordéon morose, une mélodie simple. C’est beau.

    Je suis seul dans le wagon à part l’accordéoniste triste et je me rends compte qu’il ne joue pas pour moi, mais pour lui-même, peut-être par nostalgie. On passe de paysage décrépit en chantier de nouveaux quartiers d’affaires jusque à la Gare du Nord ou je descends, laissant l’accordéoniste et sa mélopée. Il ne m’aura rien demandé.

    J’imagine que c’était pour lui aussi une espèce d’intermède avant les heures de manche dans nos souterrains à jouer La vie en rose ou quelque autre morceau de ce que l’on s’imagine est notre folklore…


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  • Me voici à Paris, ville qui fut et sera mienne. Je déambule dans les rues suivant une ancienne et habituelle trajectoire - visant d'abord WHSmith au bout de la rue de Rivoli pour y acheter de la science-fiction anglophone puis bifurquant vers le quartier latin à la recherche des librairies hispaniques (elles ferment les unes après les autres : celle de la rue Monsieur-le-Prince, celle rue de Seine...) pour y trouver peut-être le dernier Sepulveda. C'est la fin de l'été déjà quelques feuilles mortes sont tombées des platanes. Il fait beau, des foules flânent dans les quartiers touristiques.

    Peut-être que mon séjour tananarivien a aiguisé mon ouïe et mon regard - je prête plus d'attention à l'architecture, m'arrêtant pour regarder tel bâtiment art-déco qui m'avait auparavant échappé, entendant en passant les conversations (elles sont en français, pardi, et je les comprends !).

    Comme celle de cette fille vraisemblablement rompant au téléphone depuis la table d'une terrasse de café : « je quitte Paris pour deux ou trois jours et je ne veux plus jamais te revoir... ». Ou, plus tard, lorsque moi-même attablé à une terrasse un couple de quadras se pose à côté de moi (je viens de finir un sandwich au jambon). Ils sont beaux et souriants, ont des airs de BCBG - ils viennent de se retrouver après cinq ans, comme ça par hasard dans le rue de la capitale. Il a 42 ans, elle trouve qu'il n'a pas changé, ils parlent de leurs amis communs, des lieux de la vie, du passé... Et pensant à ce que j'aurais à dire si jamais je devais croiser une connaissance perdue de vue depuis longtemps je tombe sur S. - un camarade que j'ai toujours apprécié. Nous échangeons quatre mots banaux et chacun s'en va - toutes ces années militantes pour au final quasiment rien savoir des gens que j'ai fréquenté alors de réunion en réunion, de manifestation en manifestation...

    Et voilà l'image qui me pousse à écrire : au pied d'un distributeur de billets rue de Rivoli un type en t-shirt vert avec un peu d'embonpoint, la barbe rouquine est allongé au milieu de ses affaires - c'est un clodo. Une femme, bien habillée, les lunettes mode sur le nez, le sac Zara au bras lui tapote le dos en lui parlant tendrement. Le visage de l'homme est mouillé, comme s'il avait pleuré ou comme s'il pleurait encore et elle - passante bourgeoise de ce quartier commerçant - le console.

    L'image est incongrue, on ne s'y attend pas, mais elle me réchauffe le cœur : il y a encore du monde et du beau monde sur terre.

     


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  • Je rentre ce soir en France, je ne trainerais guère longtemps en un seul endroit... Et guère longtemps en Europe !

    Le froid et les journées courtes m'attendent. La ville éclairée dans la nuit, tombée déjà - si tôt ! Ses lumières nombreuses et surréelles, m'attendent.

    Ses gens, ses endroits, sa vie, m'attendent.

    Et Tana laissera bien fleurir les flamboyants encore un moment - à mon retour elles seront encore là. 

     


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  • C'est un soir de novembre, un jour de grève dans les transports. L'atelier de typographie fermé j'ai traversé le nord du Marais à pied, espérant me perdre, me disant que je reviendrais m'y perdre. Je suis sur le retour, je rentre dans mon 18e arrondissement, je cherche la ligne 4, elle marche encore à peu près.

    En attendant le bon métro, mais sur le mauvais quai (!) je vois du coin de l'oeil deux jeunes se parler en langue des signes. C'est une jeune fille d'origine maghrébine aux traits acérés et un gars d'origine africaine portant une casquette de baseball rivée sur la tête. 

    Puis leurs gestes semblent se rythmer, devenir plus vifs. Les voilà accompagnés de l'esquisse de pas de danse. L'un lance une suite de mouvements, d'expressions, et est répondu par l'autre en une sorte de kan ha diskan gestuel.

    Je comprends alors, avant de monter dans la mauvaise rame, que je viens d'être témoin d'un battle de rap LSF... 

     


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