• Quatre murs vert pistache, des bacs rouges longeant chaque mur et devant chaque banc, encore un autre banc de la même couleur. Dans un coin une petite télévision dans une boîte en fer blanc. Les convives tapissent les bancs, l'air déjà un peu joyeux et devant chaque convive un petit verre. La tenancière va et vient avec des bouteilles de liquides tantôt clairs, tantôt teints. Elle est souriante en tout moment et remplit chaque ver de nouveau à chaque rasade bue.

    L'areke, distillat de la fermentation d'une céréale, est un alcool fort. Pour le goût divers plantes y sont mélangées et les bouteilles le long de l'étagère sont de miel, coso (il paraît que c'est un déparasitant efficace) ou d'ail...

    Ato Dereje pendant ce temps s'appuie amicalement sur mon épaule ou me tapote la jambe, me prend par le genou, tout en me racontant l'agriculture éthiopienne (il a été agronome avant que de travailler pour la mairie), la cérémonie du café (que nous pourrons voir d'ici peu) et le petit déjeuner qui nous attendra ici même le lendemain matin (un truc de viandard, puisque qu'une coopérative de consommateurs se partagera la viande d'une vache encore à abattre).

    La photo est de Philippe.



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    Cette photo évoque peu. La brume descend sur une piste, la piste descend vers Ankober, ancienne capitale du Royaume du Shoa. Menelik II y a siégé avant de devenir empereur et repousser les italiens à Adwa.

    Le 4 X 4 cahotant et mon vieil appareil ont laissé sur la pellicule un flou qui s'ajoute à celui qu'apporte l'atmosphère. Des fantômes émergent de la brume, des gens qui vont et viennent enveloppés dans leurs grands châles blancs, parfois un fin bâton sur les épaules. C'est encore le temps immobile qui se manifeste : dans ces maisons au toit en chaume, dans ces piétons ou ces chevaliers éphémères, dans les terrasses en attente de semis.

    Si le brouillard s'était levé nous aurions sans doute aperçu la vallée du Rift fendant les reliefs auxquels s'accroche la piste. Nous arrivons à Ankober toujours enfoncés dans la brume, le marché de la ville tel un ballet de fantômes dans l'ouate. Sur un piton rocheux sans doute surplombant un paysage magique le modeste palais de Menelik II a été restauré, mais toujours dans cette brume têtue nous ne voyons que le bâtiment et quelques murs de vieilles pierres, la vue nous est interdite. C'est un hôtel maintenant et dans la montée nous croisons, étonnés, un ou deux touristes...


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  • Sur ces hauts plateaux chaque pouce de terrain semble cultivé, c'est que l'Ethiopie est très peuplée et ses habitants essentiellement paysans.

    A traverser paysages de paille séchée où s'entament les premiers labours - une paire de boeufs tirant l'araire - et hameaux regroupés sur quelque butte leurs toits en chaume coiffés de croix, on a l'impression - fausse - de traverser un pays immobile depuis mil ans.

    Quelle différence avec Addis Ababa en plein boom de construction ! Des immeubles laids en verre bleuté émergent sans cesse dans la trame urbaine.


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    La ville de Debre Berhan est posé sur une plaine vallonnée bordée de deux cotés par de profondes failles : l'une menant au Nil, l'autre à l'Awash. Le monastère de Debre Garbo Golgotha est accroché au bord de la faille qui mène au Nil, au nord-est de la ville.

    On y accède a pied, en suivant un chemin qui traverse quelques villages aux toits de chaume, quelques bois d'eucalyptus. Au bord de la faille la porte du monastère s'ouvre sur un petit bâtiment : il faut y stocker ses chaussures et poursuivre la visite les pieds nus.

    Le monastère est aujourd'hui géré par un moine seul, à l'origine, il y a peut-être vingt ans, quand ils ont commencé à creuser la falaise, ils étaient deux. L'autre est mort depuis. La falaise ils l'ont creusé d'un lacis de galeries, de lieux de prière, de lecture, de vie... Il nous montre l'église dont les murs sont ornés de tissu chinois à fleurs et de christs européens kitsch. Il nous montre la source cruciforme d'eau bénite et le bain ou l'on guérit.

    Le clou de la visite est un long couloir obscur. Lorsque nous y pénétrons, le moine nous demande de cesser de parler, d'éteindre nos torches, de poser la main sur le mur gauche de la galerie et d'avancer.

    Nous avançons dans l'obscurité, trois touristes suivant le guide. Les pieds nus dans la poussière, trébuchant parfois sur le sol inégal qui semble monter. L'obscurité est totale, nous sommes déboussolés, se retrouvant parfois, mystérieusement, dans un ordre autre que celui que nous pensions être le notre. Un moment de doute... Puis, toujours la main gauche sur la paroi nous avançons à nouveau dans l'encre noire du couloir. Et voilà une lueur et voilà la lumière et le paysage sec et magnifique de cette vallée étroite s'ouvre sous nos yeux.

    Le couloir est pour ce moine orthodoxe éthiopien une métaphore de l'enfer...



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