• Quand j'étais enfant je me souviens que des amis avaient construit avec des roulement à billes et des planches un espèce de bolide avec le quel ils se jetaient dans la côte la plus pentue de Atalbeitar. Je m'étais risqué quelques fois dans la pente bétonnée essayant de piloter dans la descente la planche a roulettes dans les virages... J'avoue avoir eu peur de me prendre le mur d'une maison, ou que le truc ne se renverse...

    Ici c'est un mode de transport institutionnalisé. Des engins de même construction, avec une armature en bois à l'arrière descendent les pentes nombreuses de la ville. Debout sur une planche en contact avec un des roulements arrière, un frein, le pilote contrôle la descente. On voit ainsi dévaler les collines ces caisses à savon chargées, par exemple, de bidons bleus et jaunes d'eau - d'anciens bidons d'huile ?

    (l'engin sur la photo est à Betafo dans le Vakinankaratra, pas à Antananarivo)

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    Flotte beige de petits véhicules obsolètes. Voici des 4L, des 2CV, des R12, des 404, des véhicules d'une époque où il n'était pas encore impératif de prénommer sa production...

    Les chauffeurs de ces engins sont parcimonieux : ils éteignent leurs moteurs dans les descentes et alimentent de temps en temps leurs réservoirs de bouteilles d'un litre et demi d'essence. D'ailleurs, aux stations services ils n'achètent rarement plus que ce volume minimal de carburant... L'un d'entre eux, plus prévoyant, a même installé dans l'habitacle de sa 4L une liaison directe à son réservoir, il verse de temps à autre une lichée d'essence dans cet entonnoir ! Il contrôle ainsi précisément la consommation du véhicule dont il n'est sans doute pas propriétaire.


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  • La ville est sillonnée de gars tirant leurs charrettes, le transport de marchandises le moins cher. Ils peinent, par exemple, pieds nus frappant le bitume dans la montée de Betsaret, leur charge de planches vibrant, l'effort nu, brut... Ailleurs ce sera une charge de charbon de bois dans des sacs en jutte ayant, avant, contenu du riz, ailleurs encore un tas de bananes encore vertes... Antananarivo est une ville de collines, aux montées – rudes – suivent des descentes périlleuses. La charrette à bras est alors penchée en arrière au point de toucher le sol, une manière d'aider au freinage de l'engin au point de s'emballer.

    Près du marché d'Andravoahangy, là où sont rassemblées les 404 bâchées et ces camionnettes Citroën en tôle ondulée, il y a des pousses-pousses bringuebalants, qu'on voit rarement transporter des gens... Il n'y a rien de touristique dans ces véhicules, jamais un vasaha ne semble s'aventurer à les utiliser. Souvent les voilà transformés en de vulgaires charrettes à bras, parcourant les bas-quartiers d'une charge de bois, de riz, parfois le propriétaire de la marchandise est assis avec elle dans l'étroite cabine. Le pousse-pousseur tire alors tout cela, marchandise et patron, vers une destination inconnue.


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  • L'histoire se mesure parfois a l'aune modeste d'une plante...

    Il fut un temps, sans doute, ou l'Androy était couverte de forêts de petits arbustes épineux tels ceux que l'on voit des deux côtés de la route qui mène de Fort Dauphin à Ambovombe. Un maquis de plantes adaptées aux conditions semi-arides de la région. Est-ce que dans ce maquis se déplaçaient déjà les antandroy à la poursuite de leurs majestueux zébus ?

    Aujourd'hui, l'Androy reste un pays semi-aride, reste une terre austère balayée par un vent incessant (il sculpte les arbres qui semblent alors pousser à l'horizontale), mais les épines ne sont plus les mêmes et le paysage ressemble à un cruel bocage. Des haies de figuiers de barbarie bordent les pistes et les chemins, protégeant les champs du vent et du bétail, servant, à l'occasion, quand la pluie ne vient plus, de fourrage.

    C'est la trajectoire de ces cactus qui est fascinante. Quand les aztèques sont arrivés sur ce caillou au milieu d'un marécage qui allait devenir Tenochtitlan, ils virent le signe qu'ils attendaient (un aigle mangeant un serpent) sur un nopal - un figuier de barbarie. C'est d'ailleurs l'emblème du Mexique contemporain. C'est que cette plante est d'origine mexicaine.

    La voilà pourtant si bien enracinée en terre antandroy que rares sont ceux qui pourraient dire qu'elle en est pourtant étrangère. Une innovation paysanne - la haie vive de figuiers de barbarie - a eu un succès si fulgurant que le mécanisme de propagation de cette innovation en est oublié.

    Les paysans africains ont donc une histoire, malgré ce que peut penser M. Guiano, ils innovent, ils innovent parfois de manière si profonde que l'innovation rentre dans la tradition, et son histoire se perd...



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  • Il faudrait que j'écrive sur la mémoire. Il y a un peu plus de 17 ans j'étais venu avec mon père et ma sœur dans ce pays, un voyage touristique de deux semaines. Notre parcours avait débuté à Antananarivo, et pourtant en arrivant cette fois je n'avais plus aucune image de cette ville, rien de suffisamment net pour pouvoir retrouver un fil à tirer.

    Samedi je suis parti à pied de Betsaret où j'habite aujourd'hui vers le centre ville. Ma ballade, dont le cap était connu mais pas le chemin, m'a conduit à la gare et j'ai reconnu au coin d'une rue l'hôtel dans lequel nous avions logé (la forme de ses chambres pourtant m'échappe...). La géographie du lieu, l'entrée large à la quelle on accède par quelques marches, le pont au-dessus de la rue plus loin (en fait un tapis roulant pour transférer le courrier de la Poste au train), l'immeuble lui même - de cela je me rappelle. Je me souviens vaguement de l'avenue de l'Indépendance qui le longe, mais pas du tout de la gare, monument kitsch de l'architecture coloniale du début du 20e siècle...

    Je suis remonté en direction du Zoma, je savais qu'il avait été fermé, je l'ai lu dans un guide. De quoi je me souviens ? Il me reste en mémoire les toits en tuile, un labyrinthe flou. Il me reste l'envie d'acheter une natte en rotin, il me reste le déluge. Il me reste ma sœur et moi abrités sous une arcade (que je n'ai pas retrouvé) alors que la pluie tombe. Et en rentrant à l'hôtel nous avions été surpris de voir la rue inondée et la vie continuant les pieds dans l'eau...

    Le lendemain j'ai pris le chemin du Rova, grimpant à travers la ville haute, à travers ses rues pavées. Je suis passé devant le Palais du Premier Ministre - me rendant compte que c'était lui que je voyais depuis mon bureau et que je verrais depuis ma future maison. Le Rova a été détruit par un incendie, sans doute criminel, en 1998. Il est en cours de reconstruction, sans doute pour aller vite, c'est le béton armé qui a été choisi comme matériau de choix. Ce sera comme ces châteaux forts japonais, les formes sont là, elles gardent leur grandeur, leur élégance mais la texture... La texture a disparu et arrivé à proximité la forme perd son charme et la magie se dissipe... Je regarde le bâtiment en reconstruction et il ne me dit plus rien, ce que j'avais gardé en mémoire et que je pensais être le Rova est un autre rova, peut être celui de Ambohimanga. J'avais en tête une construction de plan carré a quatre tours comme celle qui se tient devant moi, mais en bois bleu et vert. Une structure légère, pas cette massive et imposante structure en granite...

    A travers 17 ans la mémoire fragmentée se trouve confrontée à la réalité...



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