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Par Mazeo le 24 Août 2008 à 17:12
Le chœur de l'église évangélique voisine me berce tous les dimanches matins et les dimanches après-midis comme celui-ci les gammes chantées par ses juniors me cassent les oreilles. Tout à l'heure le pasteur invectivait ses ouailles - je l'entendais trop bien sans y comprendre quoi que ce soit.Dans cette rue il y a aussi une base de mormons et on les voit parfois errer dans le quartier par paire dans leurs uniformes de VRP, blonds et rougis par le soleil. On me dit qu'ils sont tenaces...
De temps à autre je croise aussi le couple classique des Témoins de Jéhovah distribuant leur petite revue en malgache.
Et j'étais tombé sur la trace du pasteur Maillol et de son Église de l'Apocalypse dans le prénom d'un enfant lors de notre randonnée au Tsiafajavona.
Sans parler des volontaires catholiques (de Paris ou d'ailleurs), de Pedro et de son aura, des bonnes sœurs, des pères blancs et des frères missionnaires...
Sans doute que les différents segments de l'Islam ont ici leurs prosélytes aussi, puisqu'il paraît que les adhérents de cette religion croissent.
Qu'est qu'ils ont tous ces gens ? Qu'est qu'ils ont à venir ici enseigner la Seule Vraie Foi aux païens ? Ne peuvent-ils donc pas laisser les habitants de ce pays vaquer tranquillement à leurs occupations ?
C'est peut être la persistance des religions traditionnelles qui motive tous ces convertisseurs en puissance. Peut être se disent-ils qu'une religion traditionnelle est fragile dans un contexte de mondialisation et que ses tenants finiront par plier sous les coups conjugués des missions, de la modernité et de la crise... Il y aurait donc des adeptes à se faire !
Je n'ai pas particulièrement de sympathie pour les religions, traditionnelles ou autres, mais les prosélytes m'agacent bien plus et je souhaite aux païens toute la résilience nécessaire pour ne pas se laisser convertir par le premier quidam venu (ni le second d'ailleurs...).
9 commentaires -
Par Mazeo le 10 Août 2008 à 16:46
Nous étions à Ampangorina, sur la pointe nord de Nosy Komba peut-être un peu déçus par cette série de bungalows en matière végétale attendant le touriste que semble être devenu le village, par les couloirs de nappes brodés - belles mais encore comme transformant un lieu de vie en un marché artisanal, sans doute déçus par ces débarquements périodiques de groupes italiens ou français dans leurs hors-bords rapides (trois d'un coup, les voilà qui foncent vers la plage, leur cargaison de voyageurs engoncés dans des gilets de sauvetage orange fluo). Nous nous demandions, comment à l'heure à laquelle nous étions arrivés là après une traversée de l'île à pied nous allions pouvoir rejoindre Hellville. Les pirogues collectives partent surtout le matin et nous étions arrivés en début d'après-midi.Des groupes de jeunes jouaient au cartes sous le large parasol d'un grand arbre, les commentaires fusaient, les cartes suivaient. Ils se sont levés pour aller déplacer la grande pirogue sakalava à balancier qui gisait sur le sable pas loin de leur aire de jeu. Sous les encouragements ils l'ont déplacé par petits bonds jusqu'à la mer. Là, une fois dans son élément la pirogue devenait légère, maniable et un seul homme la menait par la bride comme s'il avait amené un cheval à l'abreuvoir.
Ils étaient en train de préparer cette pirogue pour un voyage spécial : un mariage devait se tenir alors sur Nosy Be impliquant des familles de Nosy Komba et un groupe important attentaient qu'elle soit prête pour rejoindre la fête.
Nous nous sommes donc greffés à ce voyage, ravis de l'occasion. Les voyageurs reflétaient d'une certaine manière les transformations en cours dans la société : devant nous sur la belle proue de la pirogue un jeune homme et une jeune femme portaient des habits moulants couverts de pubs et de paillettes, lui les fausses lunettes de star lui cachant la vue, ils avaient tous les attributs d'une jeunesse branchée ; derrière nous une femme plus âgée portait, elle, un lamba coloré , la coiffure élaborée de sakalava et les dessins fleuris blancs que les femmes du nord-est se mettent encore parfois sur le visage pour se protéger du soleil. Le moteur a démarré et appuyée sur son balancier la pirogue s'est élancée vers Nosy Be. Pendant la traversée des chants montaient des passagers, des cris d'allégresse et les deux jeunes regardaient défiler le paysage lui derrière ses lunettes mode, elle un sourire blasé aux lèvres.
A l'approche du port de Helleville la mer s'est couverte d'une moisson de voiles : voiles carrées des pirogues, voiles latines des boutres, voile triangulaire d'un voilier européen parfois égarée entre elles - un ballet de pêcheurs, de caboteurs, marins tous. Quelle élégance que ces voiles comme suspendues au-dessus de l'eau - allant, venant !
Et la nostalgie de la mer me saisit et je me dis qu'un jour il faudra bien que je navigue à nouveau...
Pourquoi pas ici ?
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Par Mazeo le 20 Juillet 2008 à 12:11
Sur la piste poussiéreuse qui relie Ambatolampy à Manjakatompo des enfants tirent ou pointent avec des boules irrégulières en granite, plus loin des adultes jouent avec des boules en métal sur le même terrain inégal. Les boules métalliques sont chères et un jour les enfants hériteront peut-être de celles que leurs ainés utilisent aussi usées soient-elles. La pétanque fait fureur sur les hauts plateaux. Dans les parcs de la capitale les jeunes y jouent s'il fait beau - des jeunes qui en France ne jouent à ce jeu qu'en tongs et en vacances - le truc étant considéré comme étant un peu ringard.
Qu'est qui fait qu'un sport trouve une résonance particulière dans un pays ? Au Nicaragua j'avais assisté (et c'est le seul match d'un sport quel qu'il soit que j'ai vu dans un stade) à une demi-finale de baseball (les Boers de Managua jouaient contre l'équipe El Norte de Matagalpa). Contrairement aux catrachos du Honduras voisin avec qui pourtant ils partagent tant d'éléments culturels, les nicas sont fans de baseball et goûtent peu au football... L'histoire coloniale (ou post-coloniale) n'explique pas tout : dans certains coins de l'ex-Empire britannique c'est le rugby qui règne (en Nouvelle Zélande par exemple) alors qu'ailleurs, en Inde ou au Pakistan le cricket est plus populaire...Ici c'est la pétanque, ainsi que d'autres sports bien franchouillards mais plus exotiques comme la canne de combat qui sont appréciés, au point que l'équipe de Madagascar de pétanque a été longtemps championne du monde... Alors pourquoi la pétanque ? Pourquoi ici et pas en Afrique de l'Ouest ?
Qu'est qui fait donc qu'un peuple adopte un sport ?
(la photo - floue et peu parlante, méritant justement légende, représente des joueurs de pétanque au parc d'Ambohijatovo)
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Par Mazeo le 22 Juin 2008 à 16:31
Le cœur de la nuit est brisé par la voix des chiens, ils s'interpellent, se répondent, s'excitent - leur aboiement sans cesse réverbérant comme d'une colline à l'autre de la ville. La cacophonie est parfois brièvement entrecoupée d'un silence, le temps d'une pensée, d'une respiration avant de reprendre à nouveau - aussi aigue et bruyante.
C'est que cette ville est pleine de chiens, créatures bâtardes au pelage pelé, on les voit courir la nuit les rues, fuyants, presque courant de biais, le regard inquiet, les cotes saillantes. Ils s'arrêtent, nous regardent méfiants un instant avant de reprendre leur chemin plus près encore du mur.
Mafou (le petit chien couturé de cicatrices) et Blackie (celui qui passe ses journées attachées derrière la maison) participent de la cacophonie poussant des hurlements dès que l'un de ces errants passe devant le portail. C'est l'appel du large. Et alors a chaque fois que je reviens à la maison une plainte angoissée se lève et Mafou essaye une fois de plus de s'échapper, aller rejoindre la meute qui rode...
Les chiens seuls derrière les murs, chiens de garde, bêtes tristes en manque de tendresse rêvent la nuit de leurs congénères qui filent dans la nuit, libres d'aller au-delà du parallélépipède de cette morne cour.
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Par Mazeo le 1 Juin 2008 à 10:25
J'avais pensé intituler ce billet « Dazibao ! » mais à la réflexion je me suis dit que ces journaux sur une corde à linge n'étaient pas vraiment des dazibao, puisqu'ils n'étaient ni autoédités, ni particulièrement officieux, ni vraiment oppositionnels.
Quoi qu'il en soit, le matin aux quatre coins de la ville les vendeurs de journaux posent les titres du jour au sol (lestés de petits cailloux) ou les accrochent à une corde à linge comme ici. Par petits groupes les passants s'arrêtent, lisent la une de feuille de chou après feuille de choux. Sans doute qu'ils commentent ce qu'ils lisent, peut-être achètent-ils même un numéro...
La presse semble florissante, les titres sont nombreux - en français, en malgache : Le Midi, L'Express, Les Nouvelles, Gazety, Ngah, Taratra... Cependant, un journal coûte environ 400 Ar, l'équivalent Smic (que peu de personnes touchent) est d'environ 80 000 Ar par mois. Donc acheter le journal chaque jour est impossible pour les « smicards » même en y laissant l'ensemble de son salaire...
Alors tous ces titres, qui les achète ? Qui les lit ?Tous ces titres, combien de tirages ?
Tous ces titres comment vivent-ils ?
Pour renflouer les caisses, des articles de certains de ces canards sont clairement des publireportages. Pour arrondir leurs maigres fins de mois certains journalistes demandent une commission lors de la rédaction d'un sujet.Dans ces conditions que signifie la liberté de la presse ?
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